Mois Benarroch
En proie au deuil de deux êtres chers, un écrivain israélien se rend en Espagne, terre de ses ancêtres, pour participer à une conférence de Juifs séfarades. À Séville, il trouve un foulard qui le réconforte pendant treize jours. Puis, aussi soudainement qu’il est apparu, le foulard disparaît à Madrid. Pour l’écrivain, ce foulard devient un symbole de la perte : des adieux aux choses et aux personnes. Il dit au revoir aux morts, mais aussi à toutes les versions de lui-même qu’il n’a jamais été et ne sera jamais.Alors qu’il se résigne à abandonner ses rêves, il rencontre un groupe de Juifs espagnols perdus en Amazonie depuis 150 ans, des personnages qu’il avait autrefois imaginés dans un roman. Les a-t-il simplement inventés ? L’imagination peut-elle façonner la réalité ?Raconté à travers de multiples voix et points de vue, *Foulard Blues* est une novella qui traverse les frontières - Maroc, Brésil, États-Unis, Israël - et les langues - hébreu, français, espagnol, portugais, et surtout le haketia, cette langue judéo-espagnole du Maroc qui persiste comme un vestige vivant d’une culture disparue... les mots et expressions laissés par un monde perdu. Foulard Blues est une œuvre profondément séfarade, mêlant humour et mélancolie, explorant les traumatismes de l’exil, la quête d’identité et la condition éternellement errante des Juifs. Mois Benarroch, souvent salué comme le meilleur écrivain séfarade d’Israël, nous offre ici un récit à la fois léger et poignant, une méditation sur la perte, la mémoire et le pouvoir de l’écriture.' Une autre étude critique complète, s’il y avait assez de monde et de temps, pourrait être consacrée aux attitudes envers l’identité et la culture séfarades dans la littérature de langue espagnole, mais je dois mentionner les romans d’un romancier marocano-israélien qui écrit en espagnol, en hébreu, et occasionnellement dans la langue judéo-marocaine du haketia, Mois Benarroch. Son Bufanda Blues (2016) et d’autres écrits tels que La trilogía tetuaní (2021), une combinaison de trois romans antérieurs, lui ont valu d’être salué comme le meilleur écrivain séfarade d’Israël par le journal le plus intellectuel du pays. Son roman le plus séfarade serait le premier mentionné, un récit triste mais humoristique du voyage d’un écrivain israélien en Espagne pour participer à une conférence d’écrivains, et l’histoire de la découverte puis de la perte d’une écharpe réconfortante sur une période d’environ dix jours. Cette trame plutôt mince donne lieu à des méditations sur l’état émotionnel d’un écrivain emmené au Maroc en Israël alors qu’il était un jeune garçon, les traumatismes de l’exil (d’Espagne, du Maroc) ; la condition éternellement exilique des Juifs, et la perte d’un ami cher à Jérusalem, se mêlant en quelque sorte au réconfort et à la perte ultérieure de l’écharpe chaude, très appréciée pendant un hiver espagnol froid, le tout dans un ton semi-humoristique et ironique de regret, de nostalgie et de quête d’identité, aidé par sa vocation d’écrivain, mais pas assez pour apaiser sa douleur. Le meilleur écrivain séfarade déplore souvent que le public n’achète pas ses livres, démontrant que parmi le public éduqué et lecteur (juif ou en Israël), il n’y a actuellement pas beaucoup de place pour plus qu’un écrivain séfarade symbolique... le roman est une sorte de parodie des romans de Sefarad aspirant à une profondeur historique.'Judith Roumani, Fiction: Writing Migration, Diaspora, and Modernity (Sephardic and Mizrahi Studies). Lexington Books (2022)Prix Kahanoff 2021. Prix Yehuda Amichai.Prix littéraire Jacqueline Kahanoff du livre de l’année 2021.Prix A. Einstein 2023.